jeudi 27 août 2015

Critique n°17 : les mystères du RPG

Le "role-playing game" ou jeu de rôles caractérise un jeu dont le principal intérêt est de nous faire incarner un personnage capable d'évoluer au cours du jeu, d'acquérir de nouvelles compétences, le tout relié à une histoire qui se doit d'être travaillée, divisée en quêtes apportant argent et expérience pour notre héros, et approfondissant l'univers et les caractères des différents protagonistes de l'aventure.

Si je m'amusais à faire une histoire du genre, on ne s'en sortirait pas. Alors nous allons parler de la dose de RPG contenue dans trois séries de jeux vidéos : la trilogie Mass Effect, la trilogie Gothic et la trilogie The Witcher. Vous comprendrez, car vous n'aurez pas le choix, les différences et les ressemblances de ces trois excellentes séries, reliées par cet acronyme barbare : RPG.

I. Présentation "rapide"des exemples

  a) Mass Effect, Bioware

2007 voit l'arrivée du nouveau jeu de type space-opera estampillé Bioware : Mass Effect. Bioware est connu principalement à l'époque pour son adaptation réussie de l'univers de Star Wars avec Knights of the Old Republic en 2003, et poursuit sur sa lancée permise autrefois par le succès de Baldur's Gate entre 1998 et 2002, jeu de rôle vidéoludique inspiré de Dungeons and Dragons, le jeu de rôle papier. Tout une époque. Comme tout, le jeu vidéo a son histoire, mais trêve de bavardages.
Space time !
Vous incarnez le Commandant Shepard dans un futur hypothétique où l'humanité a découvert grâce à une ancienne race la voie de l'espace, et se retrouve à traiter diplomatiquement sur l'échiquier galactique au moment où une menace terrible fait son apparition. La trame scénaristique se poursuit dans le deuxième épisode en 2010, puis dans le tout dernier en 2012. Entre temps, le studio est revenu à un univers médiéval-fantastique avec la trilogie Dragon Age. Et récemment, un nouveau Mass Effect s'est montré dans un petit teaser, et le monde semble prêt à replonger dans la science-fiction une nouvelle fois, sous le doux sous-titre d'Andromeda.

   b) Gothic, Pluto 13 alias Piranha Bytes

Les allemands de Piranha Bytes (ou Pluto 13, leur vrai nom depuis 2002) ont leur petit mot à dire sur le RPG. Ils ont présenté en 2001 le jeu Gothic, un open-world médiéval-fantastique, très différent des deux autres productions open-world de Bethesda que sont The Elder Scrolls II : Daggerfall (1996) et The Elder Scrolls III : Morrowind (2002).
Cette arme n'a pas été trouvée par hasard dans Morrowind
Entre deux pareils géants, le jeu allemand a réussi à tirer son épingle du jeu en proposant un jeu riche et complexe dont je n'arrête pas de vous parler ici. Le Héros Sans Nom que vous incarnez se retrouve bien malgré lui dans une gigantesque prison ceinturée par une barrière magique. L'univers assez mûr de la série, sa jouabilité difficile, et son système de compétences très particulier sera repris dans la suite de 2002, intitulée sobrement Gothic II, et dans sa toute dernière incarnation en 2006, Gothic III, sortie la même année que The Elder Scrolls IV : Oblivion.
Vous voulez cette armure ? Courage.
Ce modèle allemand sera repris ensuite dans la nouvelle trilogie Risen, présentant un univers de fantasy centré autour de la piraterie, ce qui est plutôt original, entre 2009 et 2014, le deuxième épisode de 2012 étant boudé par les fans du studio de par ses trop nombreuses concessions à un public sans exigence. Et pendant ce temps là, Bethesda sortait Fallout 3 en 2008, reprenant le thème post-apocalyptique développé dix ans plus tôt avec succès par Interplay, la boîte qui a édité les Baldur's Gate. Et puis, il y a eu The Elder Scrolls V : Skyrim en 2011. Tous ces jeus-là sont des "open-world", des jeux à monde ouvert faisant la part belle à l'exploration.
Pirates et RPG
Aujourd'hui, on attend avec impatience E.L.E.X, présenté à la gamescom 2015. Tous les fans du studio allemand prient pour un successeur spirituel à Gothic, malgré le changement drastique d'univers présentant un univers post-apocalyptique et futuriste bien différent du médiéval-fantastique et de l'univers de la piraterie. Parallèlement, on attend aussi Fallout IV. Et quand je dis "on", je dis les gens, bien sûr.

   c) The Witcher, cdp.pl alias CD Projekt

Connus pour avoir publié et traduit des jeux comme Baldur's Gate en Pologne, les polonais de CD Projekt se sont lancé dans une adaptation vidéoludique de la série de romans de Sapkowski intitulée, et je vous épargne le titre en polonais, The Witcher, ce qui donne le Sorceleur en français. En 2007 sort le premier épisode, centrée autour de la personnalité d'un chasseur de monstres amnésique du doux nom de Geralt. Ses aventures prennent de l'ampleur avec la suite en 2011 sous-titrée Assassin of Kings, ce qui a plus de tronche que les noms donnés aux Gothic, vous en conviendrez. Et finalement sort en 2015 ce que certains appellent la merveille vidéoludique, sous-titrée Wild Hunt. Vu le succès mondial de ce dernier opus, qui prend comme pari de se transformer en open-world, on peut voir la montée en puissance de ce studio polonais.
Je suis ton ami !
L'adaptation se plaît à revisiter l'univers de l'écrivain à travers un monde riche et cohérent, et aussi très sombre et comportant de nombreuses intrigues politiques. Des extensions sont prévues entre 2015 et 2016 et qui devront rajouter une à deux dizaines d'heures de contenu.

II. Les accessoires du RPG

On a présenté nos exemples, il est temps de parler de ce qui fait un RPG.

  a) Un univers profond

Pensons à n'importe quel jeu de rôle papier ou à figurine : outre le livre de règles pesant généralement plusieurs kilos, le tout devait s'accompagner d'un univers avec son histoire, de l'origine du monde à maintenant, et devant mêler références mythologiques à références historiques. Bien sûr, dans le cadre d'un livre d'armée Warhammer, ça prend son sens. Mais difficile de présenter tout en bloc dans une oeuvre de fiction, comme un roman ou un jeu vidéo. Et si vous ne présentez pas tous les tenants et aboutissants, ainsi que toutes les références politico-bestiairo-socio-économiques du monde en un bloc écrit, il faut apprendre à diluer l'information.
La fameuse roue de dialogue à la Bioware. Répondre ou poser des questions avec "investigate" ?
Avant de la diluer, il faut bien évidemment avoir un univers suffisamment cohérent pour que le joueur se dise que tout est logique pour son personnage qu'il incarne. Les armes, les gens et les monstres qu'il rencontre, tout doit avoir du sens. C'est une vraie entreprise de créer un univers vivant et riche. Et une fois créé, les développeur ont souvent la bonne idée tout à fait justifiée de lier toutes ces références dans les dialogues et l'histoire principale. Tous les personnages savent de quoi ils parlent, et sont prêts à l 'expliquer au héros que nous incarnons si nous posons les bonnes questions dans les conversations.

L'autre système de dilution passe par le principe des livres à ramasser et d'un codex à compléter. Dans le tout premier Gothic, on trouvait déjà quelques manuels sur l'histoire de la création du monde et des divinités. De même, The Witcher s'amuse à dévoiler les grands événements des livres de l'écrivain originel et à résumer de nombreuses choses dans les livres que nous pouvons collecter, et même acheter.
Présentation du codex
Le système du codex à la Bioware est très intéressant : chaque monstre, chaque lieu, chaque personnage et chaque race rencontrée s'inscrit automatiquement dans un codex virtuel accessible via le menu du jeu. Celui-ci progresse au fur et à mesure de l'avancée du joueur, l'immergeant davantage dans l'univers qu'il côtoie heure après heure. Ce système a perduré ensuite dans la série des Dragon Age. Une voix s'occupe de nous présenter tout ce que nous avons découvert, en complément de l'histoire, ce qui est un bonus non négligeable bien que cela requiert de nombreuses minutes de lecture. Et puisqu'il peut être consulté n'importe quand, libre à vous de choisir le bon moment.
Découvre le monstre et ses vulnérabilités.
The Witcher II et III vont un peu plus loin. En effet, les lieux, les personnages et même les résumés des quêtes accomplies ou non sont contées par le poète-troubadour Jasquier, compagnon du héros. Les descriptions sont alors extrêmement bien écrites, comportant leur lot de boutades, d'ironie et de références. Idéal. Quant au bestiaire, il a désormais un impact en jeu puisqu'il dévoile les forces et faiblesses de chacun des monstres, et même leur vulnérabilité dans le troisième opus.

   b) Qui jouez-vous ?

Le personnage principal du RPG est celui que nous sommes censés incarner. A cela les développeurs ont répondu de différentes manières. A la manière des jeux de rôle papier, une fois les règles apprises et l'univers maîtrisé, le joueur a toute latitude pour choisir sa race, sa classe, sa personnalité. Dans le domaine du jeu vidéo, cela se traduit par une personnalisation du personnage, avec un choix en début de partie. Il s'agit aussi de considérations esthétiques, ou comment trouver le nez parfait avec Mass Effect.
Choisis ta face.
Justement, parlons-en des différences. Mass Effect propose de choisir une classe, un passé, une tête, mais vous resterez le commandant Shepard et seules quelques lignes de dialogue différencieront vos différents passés. Dragon Age est allé plus loin : chaque race est assortie d'une ascendance, par exemple noble ou miséreux, et quel que soit votre choix, vous aurez un prologue différent à chaque fois. Si l'histoire s'avère ensuite la même, la personnalisation de votre personnage avant de jouer est un vrai plus.

De l'autre côté, on a les RPG qui nous forcent à jouer avec un personnage déjà construit et prédéfini. L'amnésie dans The Witcher I permet de jouer de cette facette en nous faisant incarner un héros connu de tous sauf de lui-même et de nous, joueurs. Mais même ainsi, le personnage garde sa personnalité, son passé qu'il s'agit dès lors de découvrir au cours du jeu.
"Je ne connais ni ton nom, ni ton passé, et je m'en fous."
Et puis on a, et c'est rare, le RPG qui décide de mettre en place une page blanche, Gothic. Si le protagoniste du 1 est le même que celui du 2 et du 3, seules vos actions et vos capacités déterminent votre nom. Vous n'êtes rien sans jouer, alors que Geralt reste Geralt quand vous ne jouez pas. Vous n'avez pas de passé ni de nom. C'est peut-être le moyen de vous accrocher davantage à votre personnage, d'autant plus que le jeu est suffisamment dur pour que le simple fait d'avancer soit une récompense en soi.

    c) Une personnalisation interne et externe

Nous y voilà au gros de la personnalisation. Un RPG est obligatoirement un jeu où votre personnage, quel qu'il soit, évolue au fil du temps. Cette évolution se traduit par de nouvelles compétences, par des bonus à tous les niveaux et par le fait de combattre des ennemis de plus en plus féroces. La personnalisation "interne", celle de votre personnage, s'accompagne d'une "personnalisation externe" concernant votre équipement. Si tout va bien, votre armure et votre bâton ridicule de début du jeu vont faire place à une belle robe de mage capable de dévier la moitié des coups ennemis et d'une épée à deux mains lançant des éclairs à la ronde.
Va tout débloquer, et on en reparle.
La part belle prise par la personnalisation externe peut s'accompagner d'un sentiment esthétique. Mais les jeux sont très différents dans leurs modèles. Mass Effect par exemple, ou encore Deus Ex, vous permettent au fur et à mesure de trouver ou d'améliorer vos armes et vos gadgets, mais cela ne changera rien esthétiquement, surtout dans le cas du premier.
Moi, fier Templier, avec une armure durement acquise.
Au contraire, c'est dans les RPG médiéval-fantastique que cette personnalisation externe prend le plus de sens, comme si les développeurs se doutaient que dans un tel univers, les joueurs s'attendent à ramasser des grosses armures et des grosses armes en avançant. Gothic et Dragon Age le montrent assez bien, quand vous passez d'armures en cuir inutiles à de vraies armures en plaque pour les plus guerriers d'entre vous, ou tout du moins de longues robes de mage. Pareillement, vos armes deviennent de plus en plus massives, et avec de nouveaux effets visuels. Tout le contraire d'un Mass Effect. Vous ne pouvez pas savoir la joie de pouvoir porter une armure si vous n'avez pas jouer à Gothic premier du nom. Les MMORPG placent cette quête du "loot" au centre même des objectifs du joueurs, avec des codes couleurs très précis, et un très grand nombre de sets d'armure à ramasser ici et là. L'accès à votre inventaire pour choisir quoi porter, du casque aux sandales en passant par les épaulettes sera nécessaire.
L'amure tiers 17 du chevalier de la mort. Ca ne se trouve pas n'importe où.
Quant à la personnalisation interne, elle s'accompagne d'effets actifs ou passifs, qui peuvent prendre des formes plus ou moins poussées. Geralt utilisera des signes de plus en plus puissants, le héros de Mass Effect plongera sur ses ennemis, mais c'est surtout dans Gothic que cette personnalisation prend tout son sens.
Choisissez vos compétences dans The Witcher.
En effet, Gothic 1 est un cas d'école en la matière : quand vous commencez le jeu, vous tenez vos armes requérant une main à deux mains, et vos coups sont si lents que chaque bataille se transforme en enfer. En améliorant votre maîtrise de ses armes, vous finissez par les tenir à une main, et vos coups sont plus rapides, et peuvent se transformer en enchaînements mortels. Cette évolution est bien plus logique que dans les autres jeux, qui se bornent à rajouter des "+15% de dégâts" ou des choses du genre, et c'est ce qui fait la popularité du jeu. De même, n'espérez pas pouvoir dépecer n'importe quel bête sans avoir appris la bonne compétence, pareil pour le déverrouillage de coffres, l'utilisation de magie, la portée de votre saut, votre vitesse de course, etc.

En tous les cas, le système ressemble souvent à des niveaux que vous franchissez petit à petit à travers vos exploits et vos quêtes, donnant des points de compétence devant être investis quelque part. Parfois, on retrouve aussi des points de réputation, comme dans les MMORPG et dans Gothic, quand vous montez les échelons de la "guilde" dans laquelle vous vous trouvez.

    d) Une histoire qui se dévoile au fur et à mesure

Suivant votre personnalisation interne et externe, l'histoire a pour but de dévoiler peu à peu l'univers dans lequel vous êtes planté, mais aussi de donner une profondeur à votre évolution, qui prend sens sous forme des fameuses "quêtes". Une quête est une tâche, un objectif à accomplir, donné selon différents moyens : tableau d'affichage, personnage clé. Ces tâches vont des plus basiques (tuer des rats et rapporter leurs dépouilles) aux plus élaborées, divisées en différentes étapes liées les unes aux autres. Ces tâches donnent généralement de l'argent, de l'expérience et de l'équipement, voire de la réputation.
Des quêtes par dizaines...
Les quêtes sont divisées ensuite entre celles principales, qui font avancer l'histoire globale, et celles secondaires qui ne servent qu'à engranger plus d'expérience. Pourquoi faire ces dernières alors ? Par souci de finir le jeu à fond, de découvrir autre chose que la trame principale, ou encore d'avoir suffisamment d'expérience pour vaincre des monstres plus puissants, les raisons sont nombreuses. Dans The Witcher, vos contrats de sorceleur appartiennent à cette branche, et comme un mercenaire chasseur de monstres, vous découvrez ce que c'est que de devoir travailler de la sorte. On peut rajouter à cela l'exploration, qui conssite à fouiner un peu partout, et qui prend surtout son sens dans les RPG de type "open-world", où on trouve des grottes secrètes, un équipement rare et parfois des monstres puissants.

The Witcher III est reconnu pour accorder une place très importante à l'écriture, et en effet, les quêtes secondaires et principales ne sont jamais simples, jamais manichéennes, et intégrées complètement à l'univers sombre de Sapkowski, et elles se dévoilent sous la forme de multiples étapes, ce qui fait de ce jeu un jeu apprécié par beaucoup aujourd'hui.
Il faut la trouver.
L'histoire se dévoile donc avec l'univers au moment des quêtes principales, car il faut toujours un objectif pour avancer, et les développeurs l'ont bien compris. Cet objectif peut être fixé au début du jeu, ou être amené au gré des événements. Dragon Age, c'est la lutte contre l'engeance, The Witcher III, c'est la quête pour trouver Ciri, Gothic, c'est la recherche de la porte de sortie, Mass Effect, c'est la lutte contre les moissonneurs, etc. Ses objectifs se complexifient, se mêlent à l'univers, et le joueur est porté par les événements.

Pour donner plus de contrôle à ce dernier, certains jeux jouent la carte du choix, qui a des conséquences plus ou moins proches sur l'histoire. Voilà pourquoi dans certains jeux, on propose différentes fins. Ces choix peuvent être simples, comme tuer ou ne pas tuer, manichéens aussi, mais c'est parfois bien plus complexe comme dans The Witcher, tant la moralité de ce jeu et la quête du "moindre mal" semblent être de véritables gageures. Respecter la volonté d'une morte peut amener par exemple à ce que cette dernière mette à sac un village entier. Et ce contrôle plaît au joueur, même si ce dernier ne dit pas non à une histoire bien réglée et ficelée. Chacun sera juge de ce qu'il préfère.

    e) Se battre pour progresser ?

Tous les RPG proposent (sauf exception notable) un système de combat. Arme blanche, arme à distance, magie et pouvoirs, votre personnage peut se spécialiser dans ces branches pour interagir avec le monde, remplir ses quêtes, et mettre en place une personnalisation active. Mais le système prend plus de profondeur lorsque certaines situations peuvent être réglées avec la langue, quand par exemple vous avez investi des points de charisme et de persuasion, ou encore par la discrétion. Dans les jeux que nous avons choisi, on a parfois le choix durant certaines quêtes de les faire se terminer d'une façon ou d'une autre. On pense par exemple à Gothic, où démantèlement d'une fabrique clandestine de drogues peut se faire par les armes, par le mensonge ou par la ruse. Mais nos trois jeux ne se finissent qu'avec de la baston.
La ruse t'est inutile dans ce cas précis.
Il est rare de trouver un RPG utilisant d'autres ficelles, mais quand il le fait, c'est grâce aux mécanismes de l'infiltration. Ces RPGs jouent la carte du choix laissé au joueur quant à la gestion de la situation. On pense à Dishonored (qui n'est pas vraiment un RPG), et aussi à Deus Ex. Passer entre les ennemis, les rendre inconscient, tout cela donne des points d'expérience. Et même si des événements scriptés poussent le personnage de Deus Ex : Human Revolution à tuer certains ennemis dans des cinématiques, le nouveau Deus Ex annoncé n'hésite pas à dire que cela pourra cette fois être vraiment évité.
Je ne suis pas là.
Conclusion

Les ingrédients d'un bon RPG, et même d'un RPG en général, nous apparaissent clairement. Le joueur doit être ballotté dans un univers autre que le sien, jouant un personnage caractérisé par ses actions, par sa personnalisation continue et par son rôle dans une histoire qui le dépasse, et qui prend souvent des dizaines d'heure. En bref, le maître-mot du RPG, c'est l'immersion. Et il m'a fallu un article entier pour le prouver. Sublime.

Pour compléter, on dira que j'ai choisi des RPG se jouant à la troisième personne, ce qui pose plus la question esthétique que dans les cas à la première personne. Aussi, dans Mass Effect, on peut choisir son sexe. Mais l'immersion peut se faire d'un côté ou de l'autre dans le cas des personnages prédéfinis même si le sexisme dans le jeu vidéo peut être un sujet intéressant à traiter. Dans les vieux RPG, votre héros n'a pas de voix durant les dialogues (et même dans Dragon Age). Mais tout cela n'impacte en rien votre expérience de l'immersion. Enfin je crois.

jeudi 6 août 2015

Raconter un jeu vidéo - Gothic : courage fuyons ! (5)

Après avoir tué mon premier homme et vécu une nuit de cauchemar, j'appris que le gourou en chef était toujours inanimé. Ni une, ni deux, je fus sommé d'aller chercher des herbes médicinales en courant au milieu des requins du marais. Je rencontrai même un malade qui vivait dans les marais dans une petite hutte. Se rendait-il compte qu'il vivait avec ses haillons dans un marais où même les templiers hésitent avant de mettre leurs pieds dedans ? Quoi qu'il en soit, il était trop tard. Y'Berion s'était éteint, et avec lui les réponses aux questions de tous les fidèles du Dormeur. Le Maître des Templiers se ressaisit bien vite. Il m'apprit qu'Y'Berion avait dit dans son délire que le Dormeur était tout sauf de nature divine. La conclusion de mes observations me vint vite en bouche : c'est un démon. Je lui racontai alors ma virée dans le cimetière orc. Il comprit alors que la rigolade était terminée. Il reprit en main le camp et m'envoya aux mages de l'eau du Nouveau Camp. Mon aventure dans la Secte était terminée. Avant de partir, il rajouta que Cor Kalom, devenu presque dément, avait emmené des Templiers avec lui dans une location encore inconnue. Ca n'augurait rien de bon.
Portrait de famille. Lézards morts à droite. A gauche aussi...
Je n'arrivais pas les mains vides. J'avais en ma possession la pierre de concentration qui avait servie à ériger la barrière. Le Maître des mages de l'eau la prit avec empressement, mais me signifia que pour faire exploser le minerai qu'ils collectaient depuis des années pour mettre à bas la barrière, ils avaient aussi besoin des quatre autres. Me revoilà sur la route, après avoir fait le plein de fioles. Chacun des camps avait toujours été inactif, je me rendis compte que seul moi pouvais changer un tant soit peu mon destin. Après avoir été aussi loin que les catacombes orcs, je n'avais plus rien à perdre. Une belle épée ciselée à deux mains me servait d'arme désormais. Elle avait été empruntée à un Templier mystérieusement tombé d'un arbre. Le vent était trop fort apparemment... (Oserais-je vous avouer que mon talisman magique s'est emballé ?)
Gorn, le mercenaire bourru qui porte généralement une lourde hache sur ses épaules (IcedWingsArt)
J'avais tort de m'en faire. Apparemment, les quatre personnes les plus sympathiques de la prison s'étaient donné rendez-vous à chacun des lieux que je dus visiter pour récupérer les pierres : le novice Lester, Diego, le magicien de feu Milten et le mercenaire Gorn. Pour des raisons diverses, chacun avait un intérêt à se retrouver au sein d'anciennes bâtisses ou de lieux anciens. Intuitivement, je me dis qu'ils devaient sûrement partager un lien. Je dus en tous les cas combattre des nuées de harpies qu'il convenait d'abattre à coup de flèches, des squelettes menés par un mort-vivant maudit et même un troll ! A chaque fois, je triomphais à peine. Mais je n'étais plus le pitoyable guerrier de mes débuts. En remerciant les quatre larrons, je ramenai finalement les quatre pierres manquantes aux magiciens de l'eau. On me remercia et...on m'expliqua que désormais, pour que le rituel s'accomplisse, il fallait convaincre les mages de feu de les aider... Un rendez-vous au Vieux Camp en somme. La tâche était difficile, assurément. J'utilisai le peu de magie que j'avais pour retourner au camp de la Secte. Celle-ci était entre de bonnes mains, même si la majorité des gens ne savaient plus vraiment s'il fallait prier ou juste fumer. Au vu de mes services, on m'accorda la distinction ultime : j'enfilai la plus solide des armures de Templier. Me couvrant tout le corps, j'étais prêt à affronter tous les dangers du Vieux Camp. Il était temps de se barrer d'ici...
Un fier templier : moi !

lundi 3 août 2015

Raconter un jeu vidéo - Gothic : le cimetière de l'espoir (4)

En m'enfonçant dans la montagne, j'eus la désagréable impression d'être observé de loin. Des formes indistinctes sur les rochers s'effaçaient à mon approche pour réapparaître plus loin. Je serrai ma masse d'arme contre moi. Le novice qui me faisait office de guide m'indiqua un pont avant de retourner retrouver la sécurité du camp. Il allait prier pour moi, qu'il disait. Le pont rudimentaire craquelait sous mes bottes de templier, à mon plus grand déplaisir. Et puis je les vis, au loin. Derrière une meute de cabots faisant la moitié de ma taille, quelques créatures vertes massives se reposaient autour d'un feu. Aucune trace des templiers. Je n'eus pas le temps de réfléchir plus longtemps, l'un d'eux me montra du doigt en descendant d'une colline. J'aplatis la meute de chiens qui me séparait d'eux, et me retrouvai face à des créatures humanoïdes d'au moins deux mètres de haut. Ils tenaient fermement dans leurs mains de lourdes haches rouillées, et hurlaient des paroles incompréhensibles. A chaque coup que je parais, mon corps entier vibrait. J'activai dans un sursaut de désespoir ma rune qui les repoussa à plusieurs reprises. J'en profitai pour plonger sur eux et leur écraser le crâne avec ma masse. Ces créatures vertes saignaient comme les autres au moins.
Un de ces terribles monstres...
Essoufflé, je m'assis un instant en repensant à tout le chemin que j'avais parcouru depuis mes débuts dans la prison. Je pris conscience que la guerre menée par le roi était loin d'être vaine, et avait effectivement besoin de toutes les ressources possibles et imaginables. Mais je n'admettais pas mon sort, rassurez-vous. Je constatais seulement que ces terribles créatures ne voyaient en nous que des gêneurs qu'il fallait éliminer dès que nous apparaissions sur la route. Mais ne faisions-nous pas pareil à leur encontre ? Après tout, nous profanions une de leur crypte. Cette pensée me fit rapidement oublier ma fatigue. J'enjambai les cadavres et me précipitai dans la crypte retrouver les templiers. Des bruits furieux de combat s'entendaient au loin, par écho, pendant que de toute part, j'étais entouré de momies desséchées, d'objets divers et de tombes. Cette grotte suintante et humide était donc le lieu de repos éternel de ces orcs. Je n'eus pas le temps de m'extasier sur la vue. Un templier, une hache enfoncée dans le corps, reposait sur le sol. Ses yeux exprimaient un calme impressionnant compte tenu de ce par quoi il avait dû passer avant de mourir. A son tour de dormir. Je combattis la peur et les orcs à l'aide de toutes mes compétences. Jamais je ne m'étais senti aussi proche de la fin, et le souvenir de ce cimetière me hantera jusqu'à la fin de mes jours. Ces joutes terrifiantes dans le noir, ces parades désespérées, ces hurlements, et le bruit de leur corps tombant sur la pierre, c'était beaucoup pour un seul templier.
Un survivant
Tous les Templiers avait donc péri. Tous avaient le même visage impassible quand je passais à côté d'eux. Heureusement, je rencontrai le gourou qui les menait. Il combattait en virevoltant une pelletée d'orcs. Aucun de leurs coups ne pouvaient le toucher tant il semblait agile. Malheureusement, il était submergé. J'arrivai pile au bon moment, et à deux, nous vînmes à bout de ces orcs. En haletant, il me raconta l'embuscade. Je proposai la fuite, il me proposa de finir l'exploration de cette cave pour découvrir ce que le Dormeur avait à nous dire. Bien qu'intimidé à l'idée de rester ne serait-ce que quelques minutes supplémentaires dans cette cave sombre et dangereuse, j'acceptai. Nous étions deux, et trois passages s'étendaient devant nous. Les deux premiers étaient remplis d'orcs dont nous eûmes du mal à nous défaire. En nage, et au bord de l'évanouissement, nous trouvâmes deux fragments de parchemin. Nous nous asseyâmes, nous reprîmes quelques forces et soudain, l'inspiration de mon collègue éclata au grand jour. Il se leva brusquement en m'indiquant que ce parchemin était un rituel de téléportation activable à un certain endroit.
Un guerrier orc...
Le troisième chemin nous mena à une vaste salle, remplie de colonnes de pierre finement taillées, révélant un savoir-faire certain qu'on n'imaginait pas vu la brutalité de ces créatures. Les mêmes orcs qui tout à l'heure nous assaillaient étaient cette fois menés par un orc plus grand, plus fort, mieux équipé. J'appris plus tard qu'il s'agissait d'un guerrier orc, alors que nous combattions depuis tout à l'heure de simples éclaireurs. Nous pâlîmes légèrement, mais nous partîmes confiants au combat. Au bout d'une minute qui me parut durer une éternité, la joute guerrière était terminée. Nous restions les seuls êtres vivants au sein de ce gigantesque hall où aucune nouvelle porte ne se dévoilait à notre regard. Le regard brillant, mon compagnon agita le parchemin un peu partout dans la pièce. Je repérai un mur étrange et je l'appelai. Je lui pris le parchemin, le lut à voix haute, et la magie s'accomplit. J'étais de l'autre côté du mur. 

Je dégainai mon épée, mais pas un bruit. Grâce à un mécanisme, j'ouvris le mur derrière moi, et nous arrivâmes tout deux sur le lieu de la vision... Mais rien ne se passait. J'espérais voir un signe de ce Dormeur, car une vision commune à des dizaines de personnes ne pouvait pas avoir lieu au hasard, mais je fus bel et bien déçu. Ce fut le cas de mon compagnon, bien entendu, sauf qu'il commença à se prendre la tête entre les mains en hurlant et en clamant que le Dormeur avait besoin d'un sacrifice humain bien sanglant. Horrifié face à cette transformation soudaine, je lui sommai de rengainer son épée qu'il avait empoigné, me pointant avec. Rien à faire. J'agis mécaniquement. Je déviai son épée et le tuai d'un coup sec. C'était mon premier meurtre. C'était la première fois que je tuais un autre être humain. Et malheureusement pas la dernière. Il retomba sur le sol, la grimace de haine de son visage ne s'était pas estompée. Je pensai alors : et si le Dormeur n'était pas ce que les gourous attendaient de lui ?...

dimanche 2 août 2015

Raconter un jeu vidéo - Gothic : gloire au Dormeur ? (3)

Je devenais donc un fier Templier, encore incapable de manier une épée à deux mains proprement et terriblement faible face aux vraies menaces de ce monde, comme j'allais bientôt le découvrir. Juste avant de rejoindre cet ordre guerrier, je rencontrai Y'Berion, le gourou le plus expérimenté de la Secte. C'était grâce à Lester qu'une audience m'avait été accordée. Pour vous présenter brièvement ce garçon, je dirais que c'est un chic type, très affable malgré ses penchants pour la fumette. Il m'avait tout de suite pris en amitié, et m'avait donné des informations précieuses sur la Secte. Je ne sais pas ce qu'il avait fait pour se retrouver emprisonné, mais je n'en avais cure.
Peu sectaire pour un membre d'un secte (IcedWingsArt)
Y'Berion quant à lui m'apparut comme un homme frêle, un peu trop rêveur pour considérer la réalité matérielle du monde. Il méditait dans un temple dédié au Dormeur, où parmi les parois rugueuses et les marches en pierre taillée on pouvait croiser des femmes. Les premières que je voyais depuis un bon bout de temps. Esclaves ? Pire encore ? Je ne savais pas. Tout ce que je savais, c'est qu'il me fallait trouver une des cinq pierres de concentration qui ont servi à ériger cette fichue barrière magique. Fort heureusement, sa location était immédiate. Je rencontrai en y allant au détour d'un chemin un Novice un peu pressé. Ce dément clamait que le Dormeur lui parlait et qu'il devra être son seul servant grâce à la pierre. Puis, sans rajouter quoi que ce soit, il sortit son arme et m'attaqua. Je parai aisément les coups donnés avec mollesse et je l'aplatis sur le sol, en lui faisant jurer de ne plus recommencer. Il partit la queue entre les jambes, suivi par le nouveau possesseur de la pierre. Y'Berion m'avait appris alors que la cérémonie d'invocation du Dormeur n'allait plus tarder. J'allais enfin voir si ce Dormeur existait réellement en-dehors de la fumette et des délires occasionnés par cette activité. Mais une autre épreuve m'attendait.
Saletés !
Les gobelins noirs. Des engeances humanoïdes faisant le quart de ma taille. Je n'avais aucun intérêt à les voir de plus près, mais mes exigences ne coïncidaient pas forcément avec leur survie. Ces petites bestioles agressives avait dérobé l'almanach d'un des novices au service de Cor Kalom, ce déplaisant larron. Sauf que cet almanach était vital pour l'invocation du Dormeur. Mais j'avais sous-estimé ces petits monstres. Avec leur petite taille, leur vélocité et leurs massues, ils pouvaient aisément passer outre ma défense en attaquant de tout côté. Et je ne disposais que d'une armure légère de Templier pour accomplir cette mission. Qu'à cela ne tienne, un des gourous m'apprit comment maîtriser les deux premiers cercles de la magie du Dormeur. J'appris qu'il y en avait quatre au total. Grâce à mes nouvelles capacités, j'investis alors dans une des runes magiques dont je vous parlais précédemment. Son prix était considérable, comparé à ma bourse d'alors. Qu'à cela ne tienne, encore une fois. En activant la rune, j'envoyais valdinguer mes ennemis en arrière, les frappant grâce au pouvoir du vent contenu dans mon nouvel objet magique. Je vins alors à bout très facilement des groupes de gobelins. La grotte où ils étaient retranchés tomba, leurs corps jonchèrent le sol et je récupérai le précieux almanach, avant de rejoindre le novice qui criait encore de terreur face à cette boucherie.
Cor Kalom, l'alchimiste de la secte.
Cor Kalom m'accueillit avec son dédain naturel, et m'indiqua négligemment que le rituel serait prêt pour minuit. Là-dessus, il s'éclipsa. Je dus le retenir par la robe pour lui demander une récompense. Tout a un prix ici. Il haussa les épaules et lança quelques pépites de minerai par terre. Le rapace ! Fatigué, je m'assoupis. Ce n'est que dans la nuit que je me réveillai brusquement : il devait être temps pour le rituel. J'arrivai face à l'esplanade du temple dédié au Dormeur. Heureusement pour moi, rien n'avait commencé. Tous les initiés, les Novices et les Templiers étaient présents. L'atmosphère était tendue, la tension, palpable. C'était le moment de vérité. Et de foi. J'allais voir de mes propres yeux ce que le Dormeur avait à nous dire. Le brouhaha de la foule s'interrompit soudain tandis que sur l'esplanade apparurent les trois plus grandes personnalités de la Secte : Y'Berion, Cor Kalom à sa droite, et le maître des Templiers à sa gauche.
Le speech du big boss.
Il nous exhorta à croire, il nous exhorta à prier, et bientôt le rituel commença. Les énergies spirituelles de tous se mélangèrent dans la pierre de concentration qui agit comme catalyseur. Tout le monde criait pour réveiller le Dormeur. Et finalement, une voix sombre tonna dans la nuit, et chacune des personnes présentes fut assaillie par la même vision : une montagne, une crypte, une tombe et un orc. Puis plus rien. Lorsque je repris mes esprits, comme beaucoup d'autres autour de moi, Y'Berion était à terre, Cor Angar, le Templier, à ses côtés, pendant que Cor Kalom fulminait et partit en trombe. Tout le monde se demanda alors ce qu'il convenait de faire, et le maître des Templiers prit la parole. Toutes les voix se turent en cœur. Il avait reconnu, comme quelques-uns, que la vision indiquait le cimetière orc, un lieu mortuaire ancien situé en pleine montagne. Il annonça qu'un gourou accompagné des meilleurs Templiers avait déjà été dépêché sur place, sûrement pendant que je peinais à reprendre mes esprits. Il fallait être patient, qu'il disait. Pendant que la foule bavarde commentait les récents événements avec un mélange d'excitation et d'anxiété, je m'approchai du maître, encore sur l'esplanade, pendant que de fidèles Templiers emmenaient un Y'Berion toujours inconscient au chaud. Il me reconnut, et m'avoua qu'il avait besoin de mes services. L'expédition n'était toujours pas rentrée, mais je devais agir comme un éclaireur pour lui indiquer comment la mission se déroulait. Je partis aussi vite que possible. 

Le Maître-Adjoint des Templiers me fournit une armure de Templier moins rudimentaire que la mienne en échange d'un "don au Dormeur", comme il appelait ce pot de vin bêtement. Celle-ci me couvrit enfin les avant-bras et les jambes, mais je restais vulnérable faute d'une cuirasse complète sur le devant. C'était tout de même mieux qu'avant. J'enfilai l'armure, empoignai ma masse d'armes, vérifiai ma rune magique et je partis au trot sur la montagne. Qui sait ce que j'allais découvrir...

Raconter un jeu vidéo - Gothic : le pays des fumeurs d'herbe (2)

Ce n'est pas tout d'avoir des rêves. Encore faut-il avoir le moyen de les réaliser. J'appris rapidement qu'avant de devenir Templier, ou même un simple Novice, il fallait que les chefs spirituels du camp me parlent. Ils avaient soi-disant besoin d'être impressionnés par mes exploits pour m'adresser la parole. Je tentai de leur parler avant d'avoir faire quoi que ce soit, mais ces idiots maugréaient et gardaient leurs bouches bien fermées. 

Je dus prendre mes marques dans cet endroit un peu moins hostile que les autres. Récolter de l'herbe, sermonner un novice plus accro à la fumette qu'au travail, faire montre d'une spiritualité sans nom en jetant un sort. Ah, la magie, oui. La chose la plus chère au monde. Des parchemins qui s'usent et coûtent bonbon, une formation aux cercles de magie qui demande un lourd investissement, et des runes magiques inaltérables mais extrêmement chères. Non merci. J'appris aussi bien vite que les monstres du marais étaient extrêmement dangereux. Ils les appelaient "Requins du Marais". Pas besoin d'aller voir de plus près de quoi il retourne !
Rester hors de portée est la clé. (scerg)
La consécration vint finalement. Auparavant, je m'amusai à rentrer dans la forteresse et je remis la lettre aux magiciens de feu. Ils m'apprirent que Xardas, leur ancien maître, s'était éclipsé et ne jurait que par la magie noire. Information peu utile, j'avais d'autres chats à fouetter. Et surtout une robe de Novice à enfiler. Enfin je devenais quelqu'un. Mais j'espérais bien que mon choix avait été le bon. Mon but principal restait de fuir cette prison à ciel ouvert. Il faut aussi dire que cette robe me protégeait bien plus efficacement qu'avant. Et j'allais en avoir bien besoin, car on m'envoya à la vieille mine à la recherche de sécrétions. Celles des Rôdeurs de la mine, des créatures arachnides aux longs poils, faisant la taille d'un demi-homme et possédant de longues pattes acérées.
Ma nouvelle tenue bien seyante.
C'est à la vieille mine en effet que se retrouvaient les plus pauvres des prisonniers, sous la férule des gardes du Vieux Camp. Ils travaillaient plusieurs jours d'affilée dans cet endroit humide, plein de couloirs étroits et d'échelles, avant de rentrer se reposer un jour ou deux au camp, et peut-être claquer la paie reçue pour oublier l'espace d'un instant qu'ils sont exploités, grâce à notre fameuse herbe des marais. Triste vie. Plus triste encore, il arrivait que les rôdeurs les mangassent. Et c'est là que j'intervins. Je fouillai plusieurs caves, me débarrassai de la vermine, en profitai pour ramasser leur queue et leurs sécrétions, ce qui me permettait de faire marcher le commerce dans les camps, et j'arrivai finalement face à une énorme grille fermée. Le garde m'avoua qu'on avait condamné cet endroit de par le nombre astronomique de Rôdeurs qui s'y trouvaient. Mais ma mission devait bien évidemment se dérouler au-delà de ces solides grilles. Trop faible pour combattre le garde, je dus recourir à d'autres stratagèmes.
Le moindre faux pas... (Weabb)
J'allai trouver le chef des gardes. Il me donna une tâche que je résolus avec brio et m'autorisa à ouvrir la grille. Encore fallait-il convaincre le garde, encore une fois, en lui amenant trois Templiers. En effet, eux aussi étaient à la recherche de sécrétions pour la Secte. La présence de ces guerriers rassuraient les autorités et les mineurs. Etre un guerrier respecté, voilà mon objectif. Et j'eus vite l'occasion de le démontrer. La grille s'ouvrit, et mes quatre compagnons de fortune et moi nous retrouvâmes vite submergés par la masse de rôdeurs. Je me frayai un chemin à travers les cadavres des bêtes. Une gigantesque grotte m'attendait, avec son lot de couloirs remplis de monstruosités. J'arrivai à coup de masse devant la reine des monstruosités. Enorme, terrifiante, mais clouée au sol.
La reine. Elle me fait encore frissonner. (scerg)
Je l'affaiblis avec mes flèches, je lus mes parchemins magiques à haute voix et je la finis d'un coup de masse sur sa gueule énorme. J'embarquai les œufs remplis de sécrétion, et je me retrouvai à la grille, ovationné par les Templiers, ravis du dénouement. Les œufs sous le bras, je revins au camp que je pouvais appeler désormais "maison". Je me reposai sereinement, et j'allai voir le lendemain l'alchimiste Cor Kalom, le même qui m'avait donné ma robe de novice. Comme d'habitude, son dédain m'exaspéra. Je dus lui rappeler que tout service a un prix, et ce n'est qu'à contrecœur qu'il me fournit une potion susceptible d'améliorer mes capacités spirituelles. Il me donna tout de suite de nouvelles missions. Je le quittai, excédé, et je rejoignis le chef des Templiers. Il m'avoua avoir été impressionné, et je devins enfin un fier Templier ! Encore fallait-il que je me trouvasse digne de ce statut...

samedi 1 août 2015

Raconter un jeu vidéo - Gothic : du scavenger pour quatre-heures (1)

Premiers pas
Sacré Diego !
(IcedWingsArt)
La rencontre avec Diego me permit de comprendre un peu mieux dans quoi je m'étais fourré, bien contre mon gré. Les prisonniers se sont divisés en trois camps. Le Vieux Camp, d'où provenait ce Diego, était le plus important. C'était de là que partaient les cargaisons de minerai pour le roi, et c'était là qu'arrivaient en retour tout ce qui permettait de vivre. C'était aussi là que la discipline et la violence ne faisaient qu'un. Avant de devenir une Ombre et ensuite un Garde, les nouveaux venus comme moi étaient forcés de travailler à la mine, de payer pour ne pas se faire maltraiter dans le camp. Après avoir refusé de payer, certains mineurs vinrent me voir pour me mettre une bonne raclée. D'autres m'attendaient à l'extérieur. J'ai vite compris qu'il fallait s'adapter au système et monter le plus rapidement possible vers le sommet de la hiérarchie, en gagnant l'estime et le respect des grands pontes. Diego fut un fidèle soutien pour moi. Il m'indiqua qui rencontrer, et c'est un peu grâce à lui que je me retrouvais entre quatre murs.  Mais me fallait trouver une occasion pour entrer dans la forteresse au milieu du camp, où se trouvaient les mages de feu et le destinataire de ma lettre. Une longue route m'attendait.
Des débuts difficiles... (joker909)
Moi !
Pendant que je réalisais mes quelques tâches, j'eus plusieurs fois l'occasion de m'aventurer à l'extérieur du camp. Dans les forêts, les grottes, les ravins, des animaux sauvages n'attendaient que moi pour me passer à la casserole, et je dus courir encore et encore pour fuir leur courroux. Avec une pioche de fortune comme seule arme, je me défendais du mieux que je pouvais, mais la réalité était cruelle. Excepté les scavengers et les molerats, le monde entier de cette bulle d'enfer m'était hostile. Des humains aux bêtes sauvages, en passant par les squelettes dans quelque crypte abandonnée où je ne m'aventurais guère. Il y avait même des orcs ! On se demandait sérieusement si la barrière avait un intérêt. Heureusement, les gardes du Vieux Camp tenaient les voies de passage majeures pour les tenir en respect, ce qui avait l'air de plus ou moins fonctionner. De toute façon, je n'avais pas très envie de les rencontrer.
A mort le scavenger !
Je ramassais des champignons, quelques pièces d'équipement abandonnées dans la nature et gardées par des créatures étranges. Je rencontrais des myriades d'animaux aussi mortels que moches. Mais je pris rapidement conscience du fait qu'il me fallait absolument me mêler aux autres hommes. Si je suis un animal social, alors il fallait me comporter comme tel. Au Vieux Camp, je rencontrai des émissaires des deux autres camps. 

Mené par un guide, aussi roublard que fougueux, je fus mené à l'ouest. Mon escorte m'évita bien des soucis, et je pus découvrir ce qu'on appelle le "Nouveau Camp". Les nouveaux venus comme moi sont contrôlés par le Seigneur du Riz, dont le but est vraisemblablement d'épuiser tout le monde à la tâche. Je me faufilais dans le Nouveau Camp pour l'éviter à chaque fois. Tout le monde n'a pas envie de se faire frapper et fouiller. Tout ce que je peux dire, c'est que l'accueil dans ce nouveau monde n'était pas des meilleurs. Si vous n'étiez ni un cultivateur de riz, ni un mineur, vous étiez un Bandit, ou un Mercenaire. Ces derniers faisaient un peu bande à part, car ils protégeaient les Mages de l'Eau, réfugiés ici. Je compris vite que le but du Nouveau Camp était bien différent de celui du Vieux Camp. Ces gens-là manquaient de tout, assuraient leur subsistance par des rapines, contre les autres camps notamment, et tout le minerai récolté était fourni aux mages de l'eau. La structure magique du minerai devait permettre de briser la barrière. Projet enthousiasmant, s'il en est. 

Règlant quelques affaires à droite et à gauche, je tentai de retourner au Vieux Camp. Certaines missions m'y enjoignaient. Mais le chemin fut semé à nouveau d'embûches, car j'étais bel et bien perdu. Je découvris à la place la mine du Vieux Camp. En revenant plus tard auprès de Diego, j'achetai immédiatement une carte. Mieux valait ne pas se perdre dans ce monde. Ici, tout coûte du minerai. Même certains entraînements. Car au fil de mes pérégrinations, je rencontrai de nombreuses personnes disposant d'un panel de compétences assez large. En échange de minerai ou non, ils m'apprirent à chasser, pour retirer les éléments les plus précieux de mes proies, ce qui me permettait de commercer. Ils m'apprirent aussi à utiliser une arme à une main. Pensez-donc, j'étais tellement mauvais que je tenais ces armes à deux mains ! L'art de forcer la serrure d'un coffre, la technique pour bander un arc, tout cela s'ajoutait à un entraînement pour améliorer ma constitution physique. Je devenais plus fort, plus apte à survivre dans le monde. Mais mon équipement laissait encore à désirer. 

Apprendre à arracher les dents des animaux morts : une perspective attrayante.
Je découvris alors, avec bonheur presque, qu'il restait un camp où l'accueil était un tant soit peu correct, même si les moeurs étaient quelque peu étranges : le Camp du Marais, aussi appelé la Secte. Ici se retrouvaient des sortes d'illuminés croyant au message du Dormeur, une entité soi-disant divine capable, si elle est réveillée, de briser la barrière magique. Les nouveaux venus était sommés de collecter de l'herbe des marais, destinée ensuite après plusieurs transformations à être fumée. Ce trafic de drogue permettait à la Secte de prospérer. Je croisais quelques drogués, accros à leur herbe, incapable de réfléchir ou de parler correctement, mais je croisai aussi les puissants Templiers, de solides guerriers capables d'utiliser de nombreuses capacités magiques, et qui croient dur comme fer au message du Dormeur. Quant à moi, j'étais très sceptique quant au message de ce "Dormeur", avec qui il était soi-disant possible de communiquer via l'herbe. Et pourtant je décidai de rejoindre ce camp. Après tout, que m'importait le Dormeur si je pouvais devenir un Templier ?

Vivre dans des marais et fumer de l'herbe ?
Prier et croire au message d'une divinité hypothétique ? (DaedraDagon)

Raconter un jeu vidéo - Gothic : le RPG du self-made man (0)

Préambule

On me balance à travers une barrière magique. Comme ça. Sans prévenir. Et après, on me frappe. Et enfin, on m'explique la situation. Dans cet ordre là, oui. Bienvenue dans Gothic.

Notre royaume et toute notre hégémonie sont menacés par les cruels orcs, qui ravagent nos terres et tuent nos concitoyens. Si ce n'était que cela, tout irait bien pour moi. Mais par une cascade d'événements, on en arrive à mon sort. Le roi a en effet besoin de troupes. Pour cela il a besoin d'hommes, mais aussi d'armes. Et ces armes sont produites à partir d'un minerai doté de caractéristiques exceptionnelles, mais qui se trouve dans un endroit clé et vulnérable. Tous les forçats du royaume, quel que soient leurs méfaits, y sont envoyés, surveillés par des gardes, tabassés pour la moindre raison, et contraints de récolter nuit et jour le minerai nécessaire à l'effort de guerre. Je ne dévoilerai ni mon nom, ni le larcin que j'ai commis pour me retrouver là. Tout ce que je sais, c'est que je ne mérite pas mon sort, comme beaucoup d'autres prisonniers avant moi.
Je ne sais si j'ai mérité mon sort. (scerg)
Comble de malheur pour moi, pour protéger davantage ce petit bout d'enfer, le roi a, il y a quelque temps, convoqué douze magiciens pour créer une barrière magique empêchant quiconque de sortir de là. Sauf que le rituel a un peu trop bien marché, et les douze magiciens ont fini enfermés dans cette prison à ciel ouvert. Pire encore, c'est durant ce rituel que la situation est devenue hors de contrôle. Les prisonniers gouvernent maintenant un petit bout de terre où on extrait du minerai, coupé du reste du monde. Ils sont coincés. Et le roi aussi. Un accord a été trouvé, et la nourriture, la boisson, l'équipement sont échangés contre le minerai. Comme je m'en suis rapidement rendu compte, la révolte des prisonniers n'a rien changé. Les plus forts des prisonniers agissent comme des gardes, les plus faibles comme des prisonniers ordinaires.

Lorsque l'on m'a projeté à l'intérieur de la barrière, c'est à peine si je connaissais ce contexte. Je ne savais pas creuser, je ne savais pas me battre, je n'avais aucun ami et me retrouvais dans l'inconnu. Tout ce que j'avais sur moi, c'était une lettre, destinée au Grand Maître des mages du feu, fournie avant ma jetée en enfer. Et ceci est mon histoire. Celle d'un self-made man. D'un SMM si vous préférez.

Episodes du SMM :
- 00 : Explications du projet
- 01 : Du scavenger pour quatre-heures 
- 02 : Le pays des fumeurs d'herbe
- 03 : Gloire au Dormeur ? 
- 04 : Le cimetière de l'espoir
- 05 : Courage, fuyons